Le but de ce billet est de calculer l’empilement infini de radicaux où la suite
est périodique de période
et
est la suite constante
, celle dont les éléments valent tous
(*).
Nous notons la valeur commune des éléments de rang pair de
et
celle des éléments de rang impair, où
sont des nombres réels strictement positifs. L’empilement
est donc
Nous allons prouver que
L’empilement
est égal à la plus grande racine de l’équation
(1)
La méthode
Nous montrerons d’abord, , que l’équation
admet une seule racine (positive) plus grande que ,
(c’est sa plus grande racine).
Ensuite, , nous construirons une suite
à laquelle est associée une suite constante d’approximations
de
. Ceci prouve que la limite de la suite
, la valeur de
, est un nombre réel.
Nous montrerons enfin, , que
, ce qui sera alors facile.
Nous noterons la fonction.
Nous l’étudierons principalement dans .
Voici un aperçu du graphe de lorsque
et
. C’est un cas où la fonction possède deux zéros positifs. Ils sont séparés par
.
Voici un exemple du second cas possible, celui où ne possède qu’un seul zéro positif. Ici,
et, comme plus haut,
.
Les détails
Nous allons utiliser les dérivées premières et secondes de :
La dérivée seconde s’annule en . Elle est strictement négative dans
et strictement positive dans
. Comme
,
est strictement décroissant et négatif dans
et strictement croissant au-delà de
. En particulier,
s’annule une fois exactement dans
, au-delà de
. Notons
ce zéro.
On voit ainsi que la fonction atteint un minimum local en
. Elle décroit strictement dans
puis croit strictement dans
. Nous allons voir que le minimum local
est strictement négatif. Dès lors,
admet un unique zéro dans
, disons
. De plus, si
, alors
possède un second zéro positif ou nul,
. Nous vérifierons que lorsqu’il existe,
.
Nous considérons
comme une fonction de
. D’après le théorème des fonctions implicites, elle est de classe
. En effet
Sa dérivée s’obtient en dérivant la relation par rapport à
, ce qui donne
Notons également que montre que
On a alors
Le minimum de dans
est donc strictement décroissant par rapport à
. Mais,
et, du coup(**),
Au total, est bien strictement négatif.
Le zéro
de
est également une fonction de classe
de
car
. On obtient aisément
Avec cette formule, on voit que la dérivée de la fonction vaut
Cette fonction est donc strictement croissante. Sa limite lorsque tend vers
est positive. Elle est donc strictement positive en les
strictement positifs. Au total,
comme annoncé.
On démontre de façon semblable que, lorsque
existe, c’est-à-dire quand
, il est strictement inférieur à
. Cette fois la dérivée de
est strictement négative car
. De plus, il est clair que
. Je ne vais pas détailler.
Pour rappel, la suite d’approximations de notre empilement associée à une suite
est la suite dont voici les premiers éléments
(de façon générale, figure immédiatement sous le
-ième radical.)
Puisque ,
et
, on a
Il est alors immédiat de voir que pour la suite définie par
la suite est la suite constante
Vu , la suite
converge vers un nombre réel
(voir par exemple ce billet) qui est la valeur attribuée à notre empilement
. Mais, clairement, nous avons
En passant à la limite, il vient .
En élevant les deux membres au carré, nous obtenons . En particulier
. Par une élévation au carré supplémentaire, nous obtenons enfin
.
Vu ce qui précède, nous avons donc et
En particulier,
P.S. Un participant du forum M@TH en Ligne, Tournesol, a trouvé une méthode plus expéditive pour prouver que possède une unique racine strictement plus grande que
. En fait, il est beaucoup plus expéditif, entre autre pour montrer que le minimum de
dans
est strictement négatif. Après être arrivé aux même conclusions que moi concernant la dérivée première
, il conclut que
est strictement décroissant sur
et strictement croissant sur
. Comme
,
est également strictement négatif. Le reste est alors clair. P.L. 06/12/2018
P.S. J’aurais dû tester le résultat sur le cas où et vérifier qu’il rend bien dans ce cas la valeur de
que nous avons calculée dans ce billet. Cette valeur est la racine positive de l’équation
i.e.
. Cela se fait facilement. Lorsque
,
est un facteur du membre de gauche de l’équation (1) :
Les quatre racines de l’équation (1) sont alors
et la plus grande est , la valeur attendue pour
. P.L. 07/11/2020
__________
(*) Les articles concernant les empilements infinis de radicaux où vous trouverez les notations et les résultats que je vais utiliser ici se trouvent sous la rubrique Empilements infinis de radicaux du sommaire.
(**) On prend en réalité la limite pour tendant vers zéro par valeurs positives puisqu’en principe
est supposé strictement positif. Par abus de notations, on note
ces limites.